Association des Parents et amis des Enfants des Etablissements Fondés par l'Abbé Oziol
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Le texte ci dessous est la transcription de l'exposé prononcé par M. Giscard directeur du foyer d'accueil médicalisé de Chanac, le 24 avril 2004, à l'occasion de l"assemblée générale de l'APEFAO.

LA PLACE DE LA FAMILLE : "Une place et une parole garanties".

La famille est une référence essentielle dans la constitution de tout sujet. Le sujet tient sa place de la rencontre de désirs parentaux. c'est ainsi que le sujet est parlé avant qu'il ne puisse parler. Dans le cadre familial, l'enfant grandit avec la garantie d'un investissement lui permettant de faire l'expérience d'affirmer sa qualité de sujet en s'opposant parois pour gagner son indépendance. Pour les adultes vivant en foyer d'accueil médicalisé, la séparation d'avec leur famille ne s'est pas effectuée du fait d'une maturation psychique mais s'est imposée du fait de la nécessité de prises en charges spécialisées. Par ailleurs leur problématique psychique ne leur permet pas de s'exprimer dans une expérience séparée de leur famille ou de l'institution. Ainsi le déroulement de la relation réciproque parents-enfants est-il perturbé et porte ses conséquences dans la relation réciproque parents-institution. Une meilleure prise en compte de ces relations est indispensable.

 

    La relation parents-enfants.    

    "Reconnaître le lien de filiation"

    Les institutions et les éducateurs se succèdent, l'ancrage du sujet dans sa famille persiste et lui donne une possibilité de repérage unique. Les relations du résident avec sa famille lui permettent de vérifier qu'il y garde une place qui symbolise sa propre permanence dans la préoccupation particulière que celle-ci  témoigne. La qualité de ce repérage se renforce des manifestations de sa famille. La réceptivité de l'équipe d'accompagnement à celles-ci n'est pas sans effet pour le résident. L'évocation de la dimension familiale et ceci, même si la famille ne se manifeste pas pour des raisons diverses qu'il ne nous appartient pas de juger, accompagne nécessairement la prise en charge. Cette évocation se fait dans le cours du quotidien, parfois en lien avec différents types de manifestations parentales (courrier, coup de fil, photos ,annonce d'une prochaine visite, d'un évènement familial...) ou lors de circonstances suggérant la référence familiale (anniversaire, fête des mères, des pères, évènements familiaux survenus dans la vie des résidents ou des éducateurs, projets...) ou à partir des signifiants mêmes du résident abordant quelque chose de son appartenance familiale. Ces signifiants peuvent devenir le point de départ d'une élaboration personnelle et élaboration de son histoire. Cette reconnaissance par les professionnels de la singularité que le résident tient de ses origines familiales est aussi une façon de rappeler (et quelquefois de se rappeler) que la famille ne saurait être remplacée par un professionnel et que l'institution n'est pas toute puissante ni omnisavante sur le résident.

    La relation famille - institution.

    Tenter de comprendre ce qui se joue dans le cadre des relations famille - institution renvoie à la question des attentes réciproques : attente de la famille, attente de l'institution.

    "Les Attentes de la famille".

    Schématiquement deux types d'attente se dessinent :

    - les attentes sur la sphère affective, sur la relation que développent les professionnels au décors de la prise en charge ; comment les besoins fondamentaux sont-ils pris en compte ? Besoin de sécurité, de soins et surtout de la qualité relationnelle des échanges "notre enfant sera-t-il aimé, bien soigné ?"

    - Les attentes centrées sur le contenu de ce qui est mis en oeuvre au quotidien, dans la vie du Foyer comme à l'extérieur. Peu de familles prennent le risque d'exprimer leurs demandes, leurs attentes, bloquées dans leur liberté du choix d'une autre institution. Il faut donc leur garantir une place et une parole dans le dispositif institutionnel : projet personnalisé, conseil de vie sociale. Apparaît, ainsi, clairement la nécessité de ne pas leurrer les parents mais de les informer sur ce qui peut être fait ou pas au regard des moyens dont on dispose.

    "Les Attentes de l'institution".

    Il est essentiel de s'interroger également sur l'attente des professionnels vis à vis des familles.

    "Associer mais pas trop", ambivalence qui se retrouve souvent dans la perception des équipes de proximité et des cadres. La tendance est forte de déplacer sur l'autre la responsabilité d'un travail avec les familles.

A ceci plusieurs facteurs :

    - la culpabilité, plus institutionnelle que personnelle du fait que le placement a interféré dans les relations parents-enfants dans le registre de la substitution,

    - la difficulté à prendre suite dans une histoire relationnelle famille-institution,

    - la crainte de déstabiliser un modus vivendi dans l'équilibre des relations établies dans certaines familles,

    - le désir de réparation ou la difficulté pour le professionnel de regarder la situation familiale telle qu'elle est et non telle que nous voudrions qu'elle soit.

    La plupart de ces facteurs se regroupent dans le caractère parfois insaisissable, immaîtrisable, le côté Terra incognita de la famille des autres, vis à vis de laquelle nous avons à nous méfier de nos projections personnelles sur ce qui devrait être "la bonne famille". Dans nos relations avec les familles nous avons à accepter cette part qui nous échappera toujours.

    Afin de réduire les tensions liées à ces rencontres, il est opportun de leur faire perdre leur caractère exceptionnel en normalisant les échanges dans le cadre d'un dispositif institutionnel bien balisé, mais ouvert, où chacun pourra prendre sa place et rien que sa place.

    Comment associer les familles.

    Pour tendre vers une complémentarité au bénéfice de la personne accueillie il faut :

    - se doter d'un esprit adéquat,

    - créer des espaces de paroles, une communication pertinente et cohérente,

    - informer avec des moyens adaptés, ...et surtout,

    - reconnaître la compétence de la famille dans la rencontre.

    Mise en oeuvre d'un dispositif institutionnel qui prenne en compte la dimension familiale :

        * Le Conseil de la Vie sociale

            Cette instance, mise en place en 1997, au Foyer des Bernardes, permet aux représentants des familles d'exercer, mais aussi d'évaluer la mise en oeuvre de leur participation au fonctionnement institutionnel et de suggérer d'autres formes participatives dont le groupe d'expression prévu dans le projet de décrets offre un exemple.

        * Une aide personnalisée

            A la demande des familles, le psychiatre et la psychologue peuvent aider les familles sur des aspects plus personnels de leur vécu, de leurs difficultés. Cette rencontre possible leur garantit le respect de leur intimité psychique.

        * La participation familiale, est actuellement sollicitée systématiquement aux temps forts de la prise en charge pour :

        - l'admission, l'accueil,

        - le projet personnalisé dans l'élaboration des ses différentes phases,

       - les évènements familiaux concernant le résident. Trop de personnes sont tenues à l'écart et privées de l'opportunité de manifestations de lien familial.

    Une communication pertinente

        Créer des espaces de paroles c'est aménager des conditions d'accueil où la famille puisse se sentir en confiance. Il convient, donc, d'adapter le nombre de participants au type de rencontre :

    - S'agit-il d'une prise de contact, de visite de l'établissement ? elle relève de la compétence de la direction.

    - S'agit-il d'une rencontre technique ? suivant l'indication, elle relève de la spécificité du ou des intervenants.

    - S'agit-il d'une consultation préalable au projet personnalisé, elle relève de la compétence du garant du projet...

    Informer avec des moyens adaptés

  Chronologiquement, le devoir d'informer la famille va s'inscrire dans une perspective diachronique depuis l'accueil du résident jusqu'à sa sortie.

Il nous appartient, dès l'accueil, de donner une information complète sur ce qui concerne l'offre de service avec comme support le livret d'accueil, le contrat, les règles de fonctionnement.

Dans l'élaboration du projet personnalisé, nous avons à dégager une lisibilité, une transparence des prestations servies sur l'hébergement, les soins, la vie sociale, les ateliers d'animation et d'expression...

Au décours du quotidien, nous avons à informer de l'évolution de l'état de santé, comme de la préparation des vacances, des sorties ou de l'éventualité d'un stage.

Si le souci d'informer va dans le sens d'une plus grande transparence, le flux d'informations doit impliquer une grande rigueur dans leur transmission.

Le pré-requis posé pour éviter tout dysfonctionnement doit être "la trace". La trace écrite de ce qui a été diffusé et qui servira de point d'appui et de référence pour tous les professionnels. 

    Rencontrer

Deux axes forts :

        - positionner la famille comme partenaire,

        - l'impliquer dans le projet personnalisé.

Positionner la famille comme partenaire c'est sortir du double lien institution-résident qui enferme, c'est ouvrir un espace de médiation et de collaboration et reconnaître la compétence familiale qui va nous servir de point d'appui, nous aider dans l'élaboration du projet personnalisé et plus précisément nous interroger sur la pertinence de nos axes de travail.

Plus globalement, le sens de cette relation à travers le dispositif mis en place va permettre :

        - A la famille de mieux comprendre ce qui, de son enfant, est devenu adulte et gagne à s'assurer la reconnaissance parentale.

        - A l'institution, d'offrir au résident un espace social lui permettant de réaliser quelque chose de lui même et de se singulariser dans un lien social. Cette position éthique trouve aussi à s'exercer dans la relation institution-parent en prenant connaissance des valeurs familiales.

Enfin, les échanges parents-équipes peuvent redonner du sens à ce dont le résident ne peut s'expliquer lui-même mais dont il témoigne parfois de façon énigmatique plus ou moins questionnante.

     Alain GISCARD, directeur du foyer d'accueil médicalisé des Bernardes à Chanac.