Association des Parents et amis des Enfants des Etablissements Fondés par l'Abbé Oziol
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100 ans de la naissance de l’abbé Oziol – Clos du Nid – Vendredi 28 août 2020

 Mgr Benoît BERTRAND, évêque de Mende

 

Monsieur le Ministre, cher Président,

Monsieur le Député,

Madame représentant Madame la Présidente du Département,

Madame la Maire de Marvejols,

Monsieur le Directeur général,

Mesdames et messieurs, vous les membres de la famille du Père Oziol,

Mesdames et Messieurs, chers amis,

 

Il arrive que, le soir de Noël, nous laissions parfois parler l’Evangile et que nous laissions parler aussi nos cœurs. Le jour de Noël peut être, dans une vie d’homme et de femme, une nuit décisive, fondatrice. Ce fut le cas pour Ste Thérèse de Lisieux, le 25 décembre 1886 au retour de la messe de minuit. A la même date, Paul Claudel, jeune homme de 18 ans aux ambitions d’écrivain, se rend à la cathédrale Notre-Dame de Paris. C’était, dira-t-il, le jour le plus sombre de l’hiver et la plus noire après-midi de pluie sur Paris. Il se tenait debout, près du second pilier à l’entrée du chœur : « En un instant, affirme-t-il, mon cœur fut touché et je crus… J’avais eu le sentiment déchirant de l’éternelle enfance de Dieu, une révélation ineffable. Dieu existe, il est là, c’est quelqu’un, il m’aime et il m’appelle ». Certains sont donc célèbres : Thérèse de Lisieux, Paul Claudel, Antoine Chevrier, Charles de Foucauld… D’autres le sont moins. Mais pour beaucoup, dans la nuit du 24 décembre, leur cœur a parlé. Ils racontent comment Noël a changé leur vie et leur foi. Ce fut le cas pour l’abbé Lucien Oziol le jour de Noël 1955. Trois enfants polyhandicapés lui sont amenés par le Dr Tosquelles : les enfants de St Nicolas. Ils sont dans un état sanitaire désastreux. Il les accueille et, avec quelques bénévoles, il prend soin d’eux. Tout va alors commencer avec un signe, le signe d’une main ouverte, d’une main tendue, une main qui accueille, qui apaise et montre un chemin de vie. La main d’un prêtre, d’un homme de cœur, la main d’un prophète et d’un bâtisseur de fraternité.

 

La main d’un prêtre. L’ouvrage de l’abbé Oziol publié en 1976 s’achève par ces mots : « Ce que j’ai fait, je ne l’aurais pas fait si je n’avais pas été prêtre ». Lucien Oziol est né, de parents agriculteurs, le 10 avril 1920 à Vieillevigne sur la paroisse de Rocles. Ordonné prêtre à 23 ans, le 19 juin 1943. Il est alors nommé aumônier des chantiers de jeunesse avant de devenir vicaire à Luc près de Langogne puis, ici, à Marvejols. Il va ensuite consacrer sa vie sacerdotale à l’œuvre du Clos du Nid et ceci durant 34 ans, avant de se retirer -en 1988- à Marvejols. Le Père Oziol s’éteindra à l’hôpital de Mende, c’était le samedi matin 27 novembre 2004, il avait 84 ans. A la suite de mes prédecesseurs, je suis fier de pouvoir, aujourd’hui, témoigner du chemin humain et spirituel de ce prêtre diocésain. Son apostolat fut assurément marqué par un tempérament d’entrepreneur, homme de conviction, d’action, de pugnacité aussi… Oh, il a dû affronter des obstacles. Il a même, parfois, suscité des réactions ou des incompréhensions, y compris dans le clergé, mais son cœur de prêtre a permis l’apaisement. La dernière décennie de sa vie fut vécue dans l’action de grâce et dans la paix devant l’œuvre considérable qu’il nous laisse. J’ai découvert avec reconnaissance, dans son dossier à l’évêché, ses confidences assez bouleversantes avec mes prédécesseurs. Prêtre pour Dieu et pour les petits marqués par la fragilité, prêtre animé par la Parole de Jésus « Aimez-vous les uns les autres », le Père Oziol fut véritablement un homme de cœur.

 

« Les enfants que je venais de voir, ces premiers débiles, comme on disait à l’époque, étaient des êtres humains. Ils devaient vivre dans des conditions humaines ! » affirmait le Père Oziol. Il savait que tout homme, toute femme est créé à l’image et à la ressemblance de Dieu d’où l’infini respect qui leur est dû. Peut-être connaissez-vous l’étymologie du mot respect ? Respecter vient du latin : re-spectare c’est-à-dire : « Regarder deux fois ». Le premier regard est rapide : on juge, parfois on critique, on colle des étiquettes, il est comme ça, vite fait, bien fait… Et puis, il y a ce second regard : un regard en profondeur, plus intérieur, il respecte, prend soin, apaise, il aime. C’est le regard de l’homme de cœur, au grand cœur ! L’abbé Oziol se lance alors dans l’aventure du Clos du Nid, incertain de lui sans doute, mais sûr de Dieu. Il se lance dans cette aventure ayant le souci d’articuler l’humanité, la foi et les sciences humaines avec la présence et les conseils du Dr François Tosquelles. Marquant ainsi l’histoire de la Lozère, le Père Oziol, avec ses collaborateurs, fut les mains du Seigneur. Jésus touchait les gens qu’Il rencontrait. Il touchait les corps des malades, s’approchait des lépreux, lavait les pieds de ses amis. Il touchait même les morts. L’abbé Oziol a contribué à manifester la proximité d’un Dieu et d’une Eglise sensibles à toute souffrance.

 

Comment ne pas relever, enfin, la dimension prophétique de sa vie. Très vite, l’abbé Oziol a perçu combien l’idée de puissance et de force pouvait perdre de son acuité pour celle d’une plus grande vigilance à l’égard de la fragilité. Oui, le vulnérable est aimable. Oui, la personne handicapée peut être au cœur de nos cités, de nos communautés. Le Père Oziol fut, à cet égard, un prophète de la fraternité avec la naissance de l’une des toutes premières maisons d’accueil pour des personnes handicapées en France. Il a professé, durant son ministère, un grand « oui » à la vie humaine appelant, sans cesse, à manifester la valeur infinie, la dignité de toute personne, aimée pour elle-même. Il a su dire, par son œuvre prophétique, que le degré d’humanité d’une société se mesure aussi à l’aune de son souci des plus faibles de ses membres. Chers amis, à la suite de l’abbé Oziol, prophète et bâtisseur de fraternité, aurons-nous l’audace, dans les années à venir, de veiller à ce que les personnes fragiles et handicapées, premiers biens de nos sociétés, soient protégées, accompagnées, servies et jamais abandonnées ? J’ose le dire ici, le handicap est l’affaire de tous, soit personnellement, soit comme citoyen confronté -un jour ou l’autre- aux interrogations qu’elle soulève.

 

Mesdames et messieurs, prêtre, homme de cœur, prophète de la fraternité et bâtisseur, le Père Oziol et le Clos du Nid sont, aujourd’hui en Lozère avec d’autres, les signes d’une main ouverte aux personnes fragiles et handicapées. Dès mon arrivée à Mende, j’ai visité quelques-unes de vos Maisons d’accueil. Quelle richesse d’avoir fait grandir, à ce point, dans le cœur de tant d’hommes et de femmes, des qualités de respect et d’écoute, de délicatesse et d’attention fraternelle. Les personnels soignants ont développé, ici, une expertise humaine, sanitaire et sociale admirable. L’Eglise y prend sa part par la pastorale de la santé, de la visite et de la proposition de l’Evangile. Merci à tous pour votre implication. Merci de votre témoignage. Merci de poursuivre l’œuvre de l’abbé Oziol. Merci encore de nous redire le sens de la fête de Noël : Dieu s’approche pour rejoindre nos pauvretés et nous tendre la main.